Le secret d'Anabella, 2°Partie
Quand elles entrèrent dans le cabinet de la sophrologue, l'inquiétude se lisait sur leur visage. La femme qui les reçut avait une cinquantaine d'années. Elle s'appelait madame Monique Carbin. Brune, les cheveux longs tirés en arrière en un chignon imposant soutenu par un bandeau rouge, elle avait des rondeurs sympathiques et ses yeux marron clair ne portaient aucune trace de maquillage. La simplicité de sa personne tranchait avec le luxe des locaux situés rue Paradis où sont installés de nombreux chirurgiens esthétiques renommés. Elle expliqua qu'elle ne pratiquait l'hypnose que dans des cas de traumatisme remontant à l'enfance et lorsque la souffrance était telle qu'aucune application psychologique ne parvenait à aider le patient. Elle écouta longuement le récit des deux femmes, sans rien laisser paraître. Elle comprit que la tâche ne serait pas facile et qu'elle prenait un gros risque en acceptant ce cas. Ne serait-il pas plus logique de procéder à ces séances avec l'accord de la police. Après tout, il s'agissait d'une affaire terrible ... Anabella n'en sortirait pas indemne, elle pourrait même découvrir une vérité insoutenable qui l'anéantirait. Elle les prévint alors des dangers et comprit que la force de caractère de la jeune femme l'aiderait dans cette épreuve.
Assise sur un fauteuil, Anabella fut invitée à se relaxer, et la voix douce de la sophrologue l'aida à se détendre puis elle lui demanda de compter à rebours de dix à zéro. "Quand vous arriverez à zéro, vous serez profondément endormie et je vous donnerai le signal du réveil en claquant les doigts". Christie assistait à la séance et elle vit son amie s'endormir subitement à la fin du compte à rebours. "Ça marche !" se dit-elle, tout étonnée.
- Vous êtes toute petite, vous vous promenez avec vos parents. Où êtes-vous ?
- Je suis dans un parc, c'est beau.
- Décrivez-moi la scène.
- Je marche entre mon papa et ma maman. Ils se disputent.
- Comprenez-vous pourquoi ?
- C'est de ma faute. J'ai déchiré ma robe sur la balançoire, mais je m'en fous, je n'aime pas cette robe.
- Vous êtes un garçon ou une fille.
- Je ne sais pas, je suis trop petite.
- Vous avez dit "petite". Ça veut dire que vous vous sentez fille ?
- Je ne sais pas...
- Que se passe-t-il après ?
- On est à la maison, maman pleure, papa crie. Je ne veux pas qu'ils se disputent à cause de moi. Je pleure aussi mais on dirait qu'ils s'en foutent. Ils ne me regardent pas. La voisine entre, ma mère lui saute dessus, elle veut lui arracher les yeux. Mon papa attrape la voisine et la sort de la maison en la tenant par la taille. Il ne revient plus, maman ne pleure plus, elle me prend dans ses bras et me console. Elle me dit que ce n'est pas ma faute, qu'elle m'expliquera quand je serai plus grande.
- Qu'est ce qui se passe alors dans votre tête, pouvez-vous décrire vos pensées ?
- Oui, quand je serai grande, je le tuerai et il ne fera plus pleurer maman et moi, je ne déchirerai plus mes robes Je vais faire plaisir à maman, je serai une gentille petite fille.
- L'avez-vous tué finalement ?
- Oui, je l'ai tué.
- Non, il est vivant, il est inspecteur de police, donc vous ne l'avez pas tué.
- C'est vrai mais j'en ai éliminé d'autres, j'ai vengé maman.
Un claquement de doigts interrompit la séance, mais ce n'était pas la sophrologue, c'était Christie, recroquevillée dans un coin de la pièce et qui hurlait "non"...
Date de dernière mise à jour : 02/07/2021
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